Catherine FichtenBiographieCatherine possède un doctorat en psychologie et mène des recherches sur la condition des personnes handicapées depuis de nombreuses années. Professeure au département de psychologie au Collège Dawson et au département de psychiatrie à l’Université McGill, elle est également codirectrice du Réseau de recherche Adaptech. Des étudiants handicapés de niveau collégial et universitaire s’expriment sur leur expérience de cyber-apprentissageJennison Asuncion, codirecteur, Réseau de recherche Adaptech
Jennison Asuncion communique des renseignements de base sur une étude sur le cyber-apprentissage, réalisée dans le cadre d’une vaste recherche entreprise par la Disability and Information Technologies (Dis-IT) Research Alliance. Divers organismes partenaires prennent part à l’étude, dont Adaptech, NEADS et l’Association canadienne des conseillers aux étudiants handicapés au postsecondaire. L’équipe de recherche est composée d’étudiants (dont certains handicapés), de conseillers pour les étudiants handicapés, de militants pour la cause des personnes handicapées, d’enseignants ainsi que de spécialistes du cyber-apprentissage (tels que des gestionnaires de services d’enseignement à distance). On entend par cyber-apprentissage l’ensemble des technologies de l’information et des communications qu’emploient les enseignants pour dispenser leurs cours. Il s’agit notamment des technologies utilisées en salle de classe, des technologies sur lesquelles reposent les cybercours et des technologies servant aux cours « hybrides » (lesquels marient formation en salle de classe et modules en ligne). Pour les fins de l’étude, l’accessibilité s’entend comme la capacité d’un apprenant de recourir seul et sans difficulté au cyber-apprentissage, sans égard à son handicap. Pour tirer parti du cyber-apprentissage, certains apprenants risquent de devoir faire appel à la technologie d’adaptation. Monsieur Asuncion donne quelques exemples de questions de recherche :
Avant d’élaborer leur outil d’enquête, les chercheurs ont eu des entretiens avec vingt-deux informateurs-clés issus de cinq groupes, soit les étudiants handicapés, les conseillers pour les étudiants handicapés sur les campus, les membres du corps professoral, les spécialistes du cyber-apprentissage ainsi que les cyberéditeurs au niveau postsecondaire. Les données ainsi recueillies ont servi à mettre au point un questionnaire qui a été diffusé par voie électronique auprès de quatre des cinq groupes, les cyberéditeurs étant exclus de l’enquête. En tout, on a dénombré 406 répondants provenant d’universités ou de collèges canadiens, dont 245 étudiants (y compris 205 handicapés), 77 conseillers pour les étudiants handicapés, 45 spécialistes du cyber-apprentissage et 39 professeurs. Des réponses ont été reçues en provenance des dix provinces canadiennes ainsi que des Territoires du Nord-Ouest. Catherine Fichten enchaîne en énonçant certains constats de l’étude et en donnant des renseignements supplémentaires sur le profil démographique des participants. Les cinq handicaps les plus courants parmi ceux signalés par les répondants étudiants sont :
Madame Fichten fait état de pourcentages encore plus faibles pour deux groupes qui se trouvent à être moins bien représentés dans l’étude, soit les participants ayant un handicap visuel ou auditif ainsi que les participants ayant du mal à utiliser leurs bras ou leurs mains. L’enquête révèle que de nombreux étudiants (44 %) ont plus d’un handicap, un constat qui souligne la nécessité d’une conception pédagogique universelle. « Il n’est pas pratique de cibler tel ou tel handicap. Il faut plutôt cibler les étudiants », affirme Madame Fichten. Cette dernière énumère les cinq méthodes de cyber-apprentissage qui, d’après les résultats de l’enquête, seraient les plus accessibles. Il s’agit :
Selon Madame Fichten, les résultats de l’étude traduisent la nature de l’échantillon. Ainsi, la plupart des étudiants sondés ont des troubles d’apprentissage plutôt que des handicaps visuels ou auditifs. L’enquête révèle également quelles sont les cinq méthodes de cyber-apprentissage les moins accessibles. Il s’agit :
Les chercheurs ont aussi posé des questions générales sur l’accessibilité du cyber-apprentissage offert par les écoles. À cette fin, ils ont demandé aux étudiants de se dire en accord ou en désaccord avec une série d’énoncés au moyen d’une échelle d’évaluation en six points. En moyenne, les résultats démontrent que le degré d’accessibilité paraît raisonnable aux yeux des participants, pour qui le cyber-apprentissage n’a posé aucun problème. D’après les répondants, les cinq principaux avantages que comporte le recours au cyber-apprentissage sont :
À l’inverse, les cinq principaux problèmes liés au cyber-apprentissage sont :
En ce qui touche le règlement des problèmes liés au cyber-apprentissage, les cinq réponses les plus populaires sont les suivantes :
Il y a lieu de s’inquiéter du constat selon lequel la plupart des problèmes liés au cyber-apprentissage n’ont pu être réglés. De même, il est préoccupant que la deuxième réponse la plus populaire soit celle voulant que le règlement des problèmes repose sur des méthodes étrangères au cyber-apprentissage. Sans égard aux résultats dans l’ensemble favorables de l’enquête, Joan Wolforth souligne que les conseillers pour les étudiants handicapés reconnaissent l’existence de nombreux problèmes chroniques. À son avis, les réactions des répondants sont dictées en bonne partie par la nature de leur handicap. Ainsi, des personnes ayant des handicaps distincts (p. ex., une déficience visuelle) ont sans doute donné des réponses différentes. Madame Wolforth explique que, tout en étant accessible en principe, la page Web de l’Université McGill impose de grands efforts à qui veut l’explorer au moyen d’un logiciel comme Job Access with Speech (JAWS). L’accessibilité est aussi fonction du niveau d’habileté technologique des étudiants. Souvent, ces derniers ne reçoivent pas toute la formation dont ils ont besoin. Par ailleurs, le coût constitue un enjeu supplémentaire. Madame Wolforth croit que ce projet de recherche détaillé facilitera la communication avec les instances administratives des universités, car il démontre qu’un cyber-apprentissage qui se veut accessible comporte des bienfaits, mais aussi des problèmes à résoudre. L’étude renseigne les étudiants et les conseillers pour les étudiants handicapés sur les ressources en place, sur l’efficacité de ces ressources et sur les besoins encore insatisfaits. Madame Wolforth poursuit en résumant les conclusions de l’étude, soit d’une part que le cyber-apprentissage procure de nombreux avantages aux étudiants et, d’autre part, que les étudiants handicapés ont accès à diverses méthodes populaires de cyber-apprentissage. Une mise en garde s’impose cependant, car l’expérience du cyber-apprentissage varie selon le handicap de la personne. Au-delà du simple cyber-apprentissage, c’est de l’existence d’une véritable cyberuniversité dont il est question. En effet, rien n’est plus impossible aux étudiants qui exploitent les ressources en ligne, qu’il s’agisse de remplir leur demande d’admission ou d’assister à une remise des diplômes. Le recours au support papier est de moins en moins courant, ce qui influence le parcours universitaire des étudiants. Bon nombre de ces derniers se heurtent encore à des obstacles, et dans certains cas la technologie constitue une épreuve de plus. Considérons l’exemple d’un enseignant qui a choisi d’inclure des graphiques animés dans une présentation-diaporama, rendant cette dernière inaccessible aux étudiants ayant une basse vision. Lorsque ces derniers ont exprimé des doléances, le professeur n’a pas compris leur réaction. Les prochaines étapes de l’étude consistent à terminer l’analyse des données, à diffuser les résultats et à formuler des recommandations. On trouvera de plus amples renseignements sur le site web d’Adaptech, à l’adresse www.Adaptech.org. Au cours de l’échange qui fait suite à l’exposé, un participant propose la création d’un forum national où les intéressés pourraient exposer leurs problèmes et échanger des solutions. Monsieur Asuncion répond que NEADS possède un serveur de liste pour le courrier électronique et que le Réseau de recherche Adaptech explore des voies à suivre. Un débat s’engage sur la manière d’inciter les professeurs à partager leur matériel didactique sur support électronique. Madame Wolforth et Madame Fichten recommandent aux étudiants d’expliquer aux enseignants pourquoi il leur faut ce matériel, précisant qu’il est possible d’apaiser les craintes des professeurs qui se soucient de la protection du droit d’auteur en signant avec eux des ententes de non-divulgation. Un participant demande conseil quant à la marche à suivre pour améliorer l’accessibilité d’un portail étudiant. Madame Wolforth répond que la meilleure stratégie consiste à tenir compte de l’accessibilité dès le départ. Monsieur Asuncion ajoute que les concepteurs de pages Web qui s’y connaissent peu en cette matière peuvent recourir à des outils automatisés de validation et de réparation tels qu’AcVerify, qui facilitent l’évaluation du degré d’accessibilité de sites existants. Priée d’indiquer si des enseignants handicapés ont pris part à l’étude sur le cyber-apprentissage, Madame Fichten répond qu’il est difficile d’identifier de tels enseignants. Environ 30 % des conseillers pour les étudiants handicapés offrent des services au corps professoral, ce qui est fort peu. Soulignant l’absence d’association regroupant les enseignants handicapés, Madame Fichten propose que NEADS mette sur pied un sous-comité voué à cette question, attendu que certains membres de NEADS pourraient éventuellement devenir des professeurs d’université. Un autre participant demande si la montée du cyber-apprentissage entraîne des problèmes d’isolement. Selon Madame Wolforth, les instances administratives doivent reconnaître que le cyber-apprentissage ne peut ni remplacer l’accessibilité effective, ni servir de prétexte au refus de rendre les campus accessibles. Par ailleurs, certains aspects positifs du cyber-apprentissage sont susceptibles de contrer l’isolement, même pour les personnes qui ne peuvent être réellement présentes. À cet égard, les bavardoirs constituent un bon exemple. On demande à Monsieur Asuncion d’expliquer la marche que devrait suivre un diplômé travaillant à son compte pour se tenir au courant des dernières technologies. Le conférencier suggère de lancer une recherche via Google en utilisant comme critères les expressions « bulletin » et « technologie d’aide et d’adaptation ». Pareille recherche permettra de dénicher des bulletins diffusant des renseignements à jour sur les technologies disponibles. Les associations semblables à NEADS et les organismes de défense des consommateurs handicapés constituent d’autres sources d’information. Madame Fichten recommande de consulter le site Web de l’Association canadienne des centres de vie autonome (à l’adresse www.accva.ca ou www.cailc.ca). En outre, on peut s’adresser au Bureau d’industrie des appareils et accessoires fonctionnels, qui relève d’Industrie Canada. Interrogée au sujet de mode de financement des aménagements destinés aux étudiants handicapés, Madame Wolforth explique que son institution a instauré un ensemble de processus distincts qui vont du financement offert à l’échelle de toute l’université (par le biais des frais prélevés pour les services aux étudiants), à des initiatives précises telles que les commandes passées par les bibliothèques ou les subventions provinciales visant la modernisation des technologies. Elle ajoute que d’ordinaire, le Bureau des étudiants handicapés est consulté dans la prise des décisions relatives à l’accessibilité de la technologie. |
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